L'histoire petite et grande

Les premières traces de vie enregistrées à Ghisoni datent de l'an 430 de notre ère, avec une église, puis un couvent de moines byzantins au VIIIe siècle (qui aurait donné son nom au village puisque dans leur langue IHIONI signifie “demeure de Jésus”, hypothèse avancée par M.Cosimi dans son livre “Toponymie grecque en Corse, 1953. Mais ce n est qu'une hypothèse bien sûr pour ce nom plutôt étrange ….). Il est  plus tard fait mention du village dans les chroniques de l'historien Giovanni della Grossa (1388 – 1464) et  l'atlas du Génois Vesconte Maglioni, daté du 20 janvier 1511. Il est probable que la situation très protégée du village, suffisamment loin des côtes pour ne pas être menacé par les raids maritimes et sa topographie favorable à l’agriculture soient à l’origine de cette installation humaine relativement précoce par rapport au reste de l’ile.

La Création du village est antérieure à celle de d’Ajaccio (1380) et Bastia (1412) mais la datation exacte reste encore incertaine. Dans la "Toponymie grecque de la Corse" il est noté la présence d’un édifice religieux habité par des moines byzantins au VIIIe siècle. Le village de Ghisoni a été pour la première fois mentionné dans les chroniques de l’historien Giovanni della Grossa (1388-1464).

Au Moyen Age, Ghisoni fut le théâtre de l’un de ces évènements historiques qui s’ancrent à la fois dans l’histoire et dans la légende avec les Ghjuvannali ou Giovannali. Il s'agissait d'une confrérie de franciscains dissidents, qui avait pris naissance à Carbini en Alta Rocca au milieu du XIVe siècle et avait essaimé en plusieurs endroits de la Corse.

Leur doctrine sociale et religieuse était fondée sur la pauvreté et le don de soi, la communauté de biens et le refus du sacrement de mariage. Ils prônaient humilité, simplicité, pauvreté et non-violence. Leur hostilité face à la hiérarchie de l'église et à la hiérarchie féodale leur vaut de se faire à la fois un ennemi avec les seigneurs locaux et l’évêque d Aleria qui les excommunie en 1352. Les Ghjuvannali en appellent à l'archevêque de Pise et obtiennent la levée de l'excommunication et leur spiritualité, leur sens religieux et social continuent à se répandre dans presque toute la Corse.

C'est probablement pourquoi en 1354, l’évêque d'Aléria, s'adresse au Pape Innocent VI et accuse les  Ghjuvannali d’hérésie et obtient une excommunication papale. Son successeur Urbain V, non seulement maintient l’excommunication mais envoie un légat en Corse. Ce commissaire pontifical, soutenu par les seigneurs locaux, organise une sainte croisade militaire dans la région de Carbini et en Plaine orientale. Au nom de l'Église, de 1363 à 1364, à Carbini, à Ghisoni et en d'autres villages on massacre de nombreux Ghjuvannali, femmes et enfants compris. Certains, plutôt que de renoncer à leur foi, sont morts les armes à la main. Les derniers Ghjuvannali qui se sont réfugiés à Ghisoni y sont brûlés et la mémoire populaire veut qu’alors que les hérétiques montaient au bûcher, le curé et les gens du pays les auraient accompagné en chantant les prières liturgiques, “Seigneur, prends pitié, Christ, prends pitié, et les deux montagnes surplombant Ghisoni  se seraient jointes aux prières en répétant « Kyrie Eleison… Christe Eleison… »

La guerre d’indépendance - Août 1739 : Le comte de Vaux à la tête de 200 hommes, appuyé par le Régiment d’Auvergne est attaqué par les Paolistes. Soldats et officiers sont tués d’autres blessés dont le Comte de Vaux. Le Marquis de Valence mena une répression féroce dans le village et la région.

Loi du 20 avril 1861 : Ghisoni devient le chef-lieu du canton.

Elles gardent encore aujourd’hui ce nom. Et cet épisode de l’histoire corse a été célébré par  le groupe Canta U Populu Corsu dans leur chanson "Ghjuvannali" (album Rinvivisce, 2001). Le paysage sévère de montagne, la cruauté de l’Inquisition, la ferveur de ceux qui cherchaient une autre voie et l’impuissance du peuple : tout cela est digne, rien moins, des meilleures scènes du Nom de la Rose  (livre d’Umberto Eco, 1980, film de Jean Jacques Annaud, 1986).

L’autre fait de guerre notable du village se rattache  à une guerre qui n’était plus seulement religieuse, plus seulement européenne mais mondiale.
Le 8 septembre 1943, les patriotes, entreprennent l’action contre l’ennemi. Ils délivrent des italiens prisonniers dans un camion allemand. Ces derniers ont été chassés du groupe scolaire dans lequel ils avaient installés leur campement. Le 9 septembre 1943, Ghisoni s'est libéré lui-même notamment grâce aux frères Carlotti (Françis et Ange) qui ont chassé le détachement allemand qui logeait dans le groupe scolaire.

Le 13 septembre ils fusillent quatre jeunes patriotes dans le défilé de l’INZECCA et tentent de reprendre Ghisoni. En vain. Les résistants aidés par l’artillerie italienne repoussent l’assaut allemand. Le général Giraud, commandant en chef des forces françaises libres visitera Ghisoni le 27 septembre 1943 lors de sa tournée d’inspection.